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Réseaux sociaux : l’apprentissage du monde d’après

Après avoir abordé les enseignements issus du numérique pour reconstruire le monde d'après, abordons son apprentissage.
Publié le : 18 juin 2020

Comment être un contributeur utile et attentionné ?

Face à la multiplication de l’usage des réseaux sociaux, il devient fondamental d’observer l’actualité en suivant :

  • ses évolutions quantitatives mais aussi qualitatives (changements sémantiques, de sentiment…)
  • la façon dont elle est diffusée sur les différents espaces
  • les individus qui l’influencent et les communautés d’intérêt associées.

L’analyse des datas ainsi obtenues peut avoir un impact direct sur le contenu à publier pour rester un contributeur attentionné et utile. Dans un environnement en perpétuel renouvellement, il est plus important que jamais pour les marques de prendre en compte le contexte dans lequel leurs publics (collaborateurs, clients, parties prenantes, partenaires…) évoluent. Enrichir leurs sujets d’écoute habituels par cette observation active fournit un éclairage stratégique. Les marques obtiennent alors une sorte de baromètre de l’état d’esprit de leurs publics et des types de messages qui résonneront avec eux. Bien au-delà du social media management, qui pourra au demeurant les intégrer pour optimiser ses prises de parole et sa contribution aux conversations, le digital listening permet une meilleure compréhension pour orienter les décisions et prises de parole qu’elles soient corporate, commerciales, marketing, voire publicitaires.

A titre d’illustration, au cours des deux dernières semaines de mars, Pinterest a vu les recherches «aider les petites entreprises» multipliées par 3 comparées aux deux semaines précédentes.Dans le même temps, les recherches pour «configurer un bureau à domicile» ont augmenté de 70%. Celles au sujet de «cadeaux pour les employés» ont été multipliées par 4 et les recherches d’idées de forfaits de soins ont doublé. Des insights que les marques peuvent observer pour mieux apprécier l’évolution rapide des centres d’intérêt de certains publics et/ou les adresser directement sur le réseau.

Le questionnement est aussi une façon proactive d’écouter. Ainsi Monki, la marque teenage de H&M, s’est dès le début de la crise, appuyée sur Instagram pour demander à ses communautés ce qu’elles avaient envie de partager en ces temps inédits. 

De la même façon, les sondages sur Twitter, les questionnements via un collaborateur sur Quora… peuvent simplement et rapidement aider les marques à avoir un retour, si ce n’est représentatif, au moins éclairant sur des interrogations qu’elles pourraient rencontrer.

 

Pourquoi l’humain doit-il redevenir central ?

La crise sanitaire a conduit la majorité des États à prendre des mesures démontrant que l’humain était une priorité. Véritables miroirs de la dynamique sociétale, les réseaux sociaux ont également (re)placé l’humain au centre de leurs échanges. Le caractère social qu’ils avaient largement perdu au profit de leur rôle de média s’est alors réaffirmé.

C’est avec cette même logique que la majorité des marques ont pris la parole pendant le confinement. Elles ont ainsi su se positionner en tant que soutiens communautaires et émotionnels.

Les illustrations sont nombreuses sur ces registres et les actions de solidarité s’affichent chaque jour sur nos timeline. 

D’un point de vue plus micro, la crise a renforcé la considération immédiate que l’entreprise porte à l’interne. En d’autres termes, les collaborateurs sont devenus plus spontanément un public prioritaire. Pour exemple, en France Elior Services a régulièrement fait savoir les différentes interventions et motivations de ses salariés. Les mettant individuellement à l’honneur sur ses réseaux sociaux, l’entreprise a ainsi démontré la force de sa mobilisation dans la crise. 

Avec sa campagne #wegotyouamerica aux États-Unis Kraft Heinz a valorisé ses 37 000 collaborateurs . Elle a fait savoir tout leur investissement pour répondre aux besoins quotidiens des consommateurs locaux.

Dans le secteur du luxe les marques se sont également largement mobilisées et exprimées. Ainsi le post de Bugatti proclamant toute sa sympathie aux Italiens affiche plus de 333 516 like.

Les réseaux sociaux eux-mêmes ont largement honoré la dimension humaine, partie intégrante de leur ADN. Facebook a ajouté une nouvelle façon de réagir sous la forme d’un emoji de visage serrant un cœur et de celui d’un cœur palpitant. Cette évolution fait du «care» le premier ajout à la liste des réactions qui avait été élargie en 2015. Une nouveauté qui démontre que prendre soin devient un comportement du quotidien mais aussi que, sur les réseaux sociaux, son expression s’inscrit dans un mode de langage spécifique.

 

En quoi l’intelligence collective éclaire-t-elle les projets individuels ?

Il est clair que cette crise n’est pas unique mais multiple. Mondiale, elle se révèle différente selon les régions et souligne les aspérités culturelles, les disparités sociales, les spécificités politiques… 

Pour autant, elle donne la part belle à l’intelligence collective. C’est bien ensemble que les solutions ont été et seront trouvées. Les espaces numériques et les réseaux sociaux l’ont illustré de bien des façons pendant le confinement.

Ainsi “Global creative brief” une plateforme créée par un groupe de créatifs pour inviter ceux du monde entier à participer à un open brief. Partageant leurs idées, s’assurant qu’elles font résonance avec tous les publics pour, in fine, être soumises à l’ONU.

 

Le marketing d’influence restera-t-il en 1ère ligne ?

Les influenceurs, comme les marques, ont dû avec beaucoup de bon sens réfléchir la poursuite ou, au contraire, l’arrêt de leur investissement en matière d’influence. Ceux restés actifs pendant le confinement ont évidemment adapté leur façon de communiquer. L’authenticité a repris du terrain, tel que le démontre Enjoy Phoenix qui filme “sans filtre” sa routine de nuit. Une tendance qui pourrait faire glisser l’influence marketing du simple placement produit au réel placement de valeurs. 

Des institutions directement impliquées dans la crise sanitaire se sont appuyées sur l’influence pour favoriser l’adhésion à leurs messages, notamment auprès des jeunes générations. Ainsi, le 16 mars l’OMS et Instagram ont-ils demandé au créateur de contenu Seth d’informer ses communautés sur l’épidémie de Covid-19. Plus tard l’OMS a même eu recours à Knox Frost, influenceur virtuel, pour consolider sa stratégie d’influence.

Enfin, si la nano influence faisait parler d’elle avant la crise, cette dernière a amplifié ce phénomène.

Ironie du sort, ce virus véritable menace invisible, a mis en lumière des individus exerçant des professions tout aussi habituellement invisibles dans nos sociétés. Ainsi, des personnes jusque là anonymes ont rapidement pris une place importante dans nos vies. Devenus nos héros du quotidien, leurs histoires ont souvent été relayées sur les réseaux sociaux. Les professionnels de la santé en 1ère ligne ont, dans de nombreux pays, capitalisé sur leurs réseaux pour lutter contre la désinformation sur le Covid-19 et partager leur quotidien dans les unités de soins intensifs afin d’inviter les citoyens à respecter les consignes de sécurité. 

Par exemple, Jason Campbell médecin et actif sur TikTok depuis quelques semaines, travaille presque non stop depuis l’arrivée de la pandémie aux États-Unis. Parfois, pendant ses courtes pauses, il réalise un TikTok. Il a ainsi déjà engagé plus de 245 000 abonnés et plus d’un million cinq cent mille de likes sur ses vidéos.

Si le marketing d’influence reste un levier fort pour les marques, elles devront réfléchir leur stratégie par le prisme de la légitimité et continuer à s’appuyer sur le brand advocacy pour nourrir efficacement leur image et réputation.

Enfin, ne l’oublions pas, dans une logique d’apprentissage le test and learn est autorisé, voire souhaité. Plus que jamais la vérité n’est plus première.

A suivre : Réseaux sociaux : une distanciation plus spatiale que sociale. Ce que les socionautes attendent des marques, la façon dont celles-ci ont commencé à y répondre et comment de nouveaux acteurs ont d’ores et déjà modifié le paysage numérique.
 

Crédit visuel“Covid 19 business closure Seattle Washington Nick Bolton on Unsplash”

Sandrine Andro

Directrice du planning stratégique et du département médias sociaux –

sandro@makheia.com